Apres l’industrie, le logiciel est-il le prochain mort sur la liste ?

Après avoir sacrifié son industrie, la France peut-elle se permettre d’abandonner le développement logiciel, pourtant l’un des principaux vecteurs d’innovation.
Innover, c’est quoi ? C’est avoir une direction, prendre des risques, s’adapter, pour aboutir à un produit réel qui trouve son marché. C’est ce dernier aspect qui fait toutes la différence avec la R&D.
Alors, pourquoi cherchons-nous si souvent à obtenir plus de prédictibilité plutôt que d’innover ?
Nous cherchons en fait à planifier à l’avance et à exclure les risques. L’objectif n’est plus essentiellement d’aboutir à un produit, mais que tout se déroule comme prévu. Mais le vrai risque n’est-il pas au final de se retrouver avec un produit sans marché ?
Pourtant, en prenant le contre-pied, et allant au-devant des risques, on affronte les problèmes indépendamment et les uns après les autres. On se donne aussi la chance d’en tirer les leçons le plus tôt possible, et de changer de trajectoire sans perdre de vue l’objectif du produit et de son marché.
L’innovation dans le développement logiciel exige de savoir faire face à des problèmes complexes. Elle requiert un vaste savoir technique, une culture étendue, une approche intuitive des problèmes, un goût affirmé de l’expérimentation, une forte capacité d’adaptation et surtout la volonté de produire des résultats. En somme, le développement logiciel ne peut pas faire l’économie des talents.
Si la récente annonce de Google d’augmenter tous les salariés de 10 % afin de contrer le départ de ses meilleurs éléments pour Facebook a pu être positivement perçue par certains d’entre nous. Pour les acteurs du logiciel, elle a été interprétée comme un aveu de faiblesse dans le domaine de l’innovation. En quelques mois, la Silicon Valley est devenu l’épicentre d’une guerre des talents, où les entreprises doivent impérativement rester attractives. Trop peu d’autonomie, trop d’obstacles à l’action, des processus trop rigides, et c’est le risque de s’annihiler la faveur des talents.
Qui peut croire que les succès d’Apple, qui continuent de changer notre quotidien, sont le simple fruit d’un processus, plutôt que le talent d’un homme et des individualités de son équipe ?
Pendant combien de temps encore, nos élites vont-elle continuer de croire que l’innovation dans le développement logiciel doit reposer sur une organisation à ce point technocratique qu’elle désespère nos talents. Sans changement de cap, le véritable risque n’est-il pas finalement que nos talents contribuent par l’innovation à la croissance d’autres économies.